Selon KPMG, les investissements immobiliers ont atteint 2,9 milliards de francs en 2018. Le point avec Laurent Aillard.
Malgré les révisions à la baisse des prévisions conjoncturelles du Secrétariat d’État à l’économie (Seco), l’immobilier genevois ne souffre pas du ralentissement économique. Selon lerapport annuel de KPMG sur le marché de l’investissement immobilier genevois, paru lundi, les investissements totaux étaient en hausse de 37% par rapport à l’année précédente. Deux grands portefeuilles institutionnels sont en cause dans l’envolée de l’immobilier des bureaux, mais le secteur résidentiel brille toujours par son dynamisme. Analyse avec Laurent Aillard, Manager Real Estate Advisory et co-auteur du rapport chez KPMG.
Oui, c’est toujours la ville de Genève qui est la plus dynamique, plus particulièrement la «Genève City» autour du quartier des banques, avec un niveau d’investissement de près d’un milliard de francs. La ville de Genève compte pour 65% des capitaux totaux, un chiffre conséquent mais dû à la structure même du parc immobilier genevois qui compte davantage d’objets immobiliers.
car le marché locatif résidentiel est globalement sous-offreur.»
Généralement, il n’y a pas suffisamment d’objets à la vente. Sur toute l’agglomération, les immeubles de logements sont très recherchés car le marché locatif résidentiel est globalement sous-offreur, ce qui limite fortement le risque associé. Sur le segment des bureaux, l’on recherche surtout des objets sécurisés qui offrent des cashflows. Pour les immeubles de bureaux vacants, les investisseurs se montrent très sélectifs, les critères de localisation et de connectivité sont primordiaux. La récente transaction d’un immeuble au Pont Rouge en est un bon exemple; c’est la centralité de ce bien qui a intéressé les investisseurs.
Les ventes de deux grands portefeuilles d’institutionnels ont dynamisé ce marché. Si on les exclues, les investisseurs ont prioritairement cherché à se positionner sur des immeubles résidentiels où il n’y a pas de risque de morosité car l’offre de vacance y est contrainte. Ce sont les opportunités adéquates d’actifs «core» qui mènent la demande des investisseurs sur le marché genevois.
au marché obligataire et au marché d’actions.»
Ces portefeuilles ont été vendus en «sale & leaseback» dans la continuité de leurs stratégies opérationnelles. Le premier a acquis un terrain sur lequel il développe un nouveau siège qui lui permettra de regrouper à termes l’intégralité de ses activités bancaires. Le second a cédé ses biens pour gagner en flexibilité et dégager des capitaux en profitant de conditions de marché actuelles très favorables.
Le rendement du bon de la confédération à 10 ans oscille en territoire négatif autour de -0,25% alors que les rendements locatifs nets oscillent globalement dans une fourchette comprise entre 3,00% et 3,50%, variable en fonction de l’emplacement. Il s’agit donc d’un spread de 275 à 325 points de base, ce qui est un écart important pour un placement offrant un cashflow récurrent et sécurisé sur le long terme. Dans un environnement de taux bas, l’immobilier reste une vraie alternative au marché obligataire faiblement rémunérateur et au marché d’actions particulièrement volatile.
Sur le marché de l’investissement, la demande restera importante et continuera de se porter principalement sur le résidentiel. L’offre restera inferieure à la demande notamment s’agissant des opportunités de qualité qui répondent aux exigences des investisseurs, ce qui crée une compétition importante. Les taux de rendement resteront probablement stables ou se contracteront encore de quelques points de base, de ce fait, les spreads resteront importants vis-à-vis du taux sans risque. Aussi, la réforme fiscale d’une réduction du taux d’imposition de 24% à 13% pourrait motiver certains propriétaires à mettre leurs actifs sur le marché afin de profiter de cette baisse. Cela dit, l’effet sera ponctuel et compte tenu des taux de rendement actuels, l’effet de la réforme devrait rester modeste.
a augmenté mais le marché a réagi pour limiter les risques.»
Sur le canton de Genève, non, pour des raisons structurelles. Le marché résidentiel est contraint et cette pénurie devrait perdurer. La demande locative aurait la possibilité d’absorber plus d’offre si cette dernière existait, mais ce marché ne présente aucun risque contrairement à d’autres régions en Suisse. Quant aux bureaux, le taux de vacance a augmenté mais le marché a réagi pour limiter les risques. Les planifications se décalent dans le temps afin qu’il puisse rester fluide.
Depuis une décennie, les taux suivent une tendance décroissante. La Banque centrale européenne a annoncé un prolongement de ses mesures de soutien, et l’on peut s’interroger sur les capacités mondiales à normaliser les taux d’intérêt. La Banque Nationale Suisse est contrainte par la BCE à cause de l’appréciation de sa devise. Il est aussi difficile d’anticiper ce qui sera le taux normal dans le futur mais selon nos anticipations, nous excluons de fortes hausses à moyen terme. Compte tenu du spread entre les placements sans risque et les rendements immobiliers, une faible remontée des taux n’aurait pas un effet trop important sur le marché de l’investissement à Genève.
Article paru sur ” Allnews.ch “
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